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fond pleine de vivacité et d’élan, autant que j’en pouvais juger à l’expression toute anglaise de ses grands yeux bleus ; et puis elle avait reçu de l’éducation ; et, dans mon ignorance de la vie, je la croyais plus savante que toutes les jeunes filles de son âge. Grace et Lucie étaient instruites l’une et l’autre, elles avaient reçu de bonnes leçons de M. Hardinge ; mais le digne ministre, dans le fond de sa bicoque des États-Unis, ne pouvait donner aux deux jeunes filles les talents de tous genres qui en Angleterre sont à la portée d’une fortune même médiocre. Émilie Merton me semblait la merveille des merveilles ; et, lorsque j’étais assis à côté d’elle, je rougissais de mon ignorance en l’écoutant.


CHAPITRE XI.


Attention, contre-maître, ou nous allons échouer. Attention, te dis-je !
La Tempête.


Le capitaine Williams, désirant me témoigner sa reconnaissance pour le soin que j’avais pris du brig, me permit de passer à terre tout le temps que je lui demandai. Je pouvais ne jamais revoir Londres, l’occasion qui se présentait pour moi de visiter cette ville en aussi bonne compagnie était trop favorable pour qu’il voulût y mettre le moindre obstacle. Il eut soin, toutefois, de faire demander à un des employés du consulat ce que c’était que les Mertons, de peur que je ne fusse dupe de quelque adroit intrigant, comme il n’y en a que trop à Londres. Les renseignements furent favorables. Le major avait été longtemps employé dans les Indes occidentales, où il avait encore une position demi-militaire assez modeste ; il était venu en Angleterre pour régler des affaires longues et compliquées, et en même temps pour retirer de pension Émilie, son unique enfant ; il devait, dans quelques mois, retourner à son ancien poste, ou aller en occuper quelque autre. C’est ce que j’avais appris déjà d’Émilie elle-même ; ce qu’elle m’avait dit se trouva pleinement confirmé par le témoignage de l’employé du consulat. Les Mertons étaient incontestablement dans une position respectable, quoiqu’elle n’eût rien de bien relevé. J’appris de plus du major qu’il avait quelques parents aux États-Unis, son père s’étant marié à Boston.

Pour ma part, j’avais à m’applaudir autant que les Mertons de l’heureux hasard qui m’avait mis en rapport avec eux. Si j’avais été