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OU LE TUEUR DE DAIMS.

souffrances pour se venger de celle qui a été cause des premières. Judith avait assez de l’esprit de sa mère pour comprendre ce sentiment, mais elle vit aussi quelle folie c’était de lui laisser prendre l’ascendant.

Tels étaient les documents qui composaient ce qu’on peut appeler la partie historique. Parmi les pièces détachées qui se trouvaient au fond du coffret était un vieux journal contenant une proclamation du gouvernement qui offrait une récompense à quiconque livrerait à la justice certains pirates dont les noms y étaient énoncés, et parmi lesquels on voyait figurer celui de Thomas Hovey. L’attention de Judith avait été attirée sur cette pièce, parce qu’une ligne à l’encre avait été tirée en marge de cet article, et que les noms Thomas Hovey étaient également soulignés. Elle n’y trouva rien qui pût lui indiquer le nom de famille de sa mère, ni le lieu qu’elle avait habité avant de venir sur les bords de ce lac. Toutes les dates et les signatures avaient été coupées, et quelques passages dans les lettres qui auraient probablement pu donner un fil pour arriver à cette connaissance, avaient été soigneusement raturés. Judith vit donc qu’il ne lui restait aucun espoir de pouvoir connaître sa famille, et qu’elle ne devait compter que sur ses propres ressources pour l’avenir. Le souvenir qu’elle avait conservé des manières, des conversations et des souffrances de sa mère, l’aidèrent à remplir quelques lacunes dans les faits qu’elle venait d’apprendre ; et, dans le fait, ce qu’elle savait déjà suffisait bien pour lui ôter le désir de posséder des détails plus étendus. Elle pria son compagnon de finir l’examen de ce qui restait dans la caisse, qui pouvait contenir encore quelque chose d’important.

— Je vais le faire, Judith, répondit le patient Deerslayer ; mais s’il s’y trouve encore beaucoup de lettres à lire, nous verrons reparaître le soleil avant que vous les ayez lues. Vous avez passé deux bonnes heures à déchiffrer tous ces morceaux de papier.

— Ils m’ont appris l’histoire de mes parents, Deerslayer, et ils ont décidé mes plans pour l’avenir. On peut pardonner à une fille de vouloir lire ce qui concerne son père et sa mère, et cela pour la première fois de sa vie. Je suis fâchée de vous faire veiller si tard.

— N’y pensez pas, Judith ; n’y pensez pas. Peu m’importe que je dorme ou que je veille. Mais, quoique vous soyez si bonne à voir et si belle, il n’est pas très-agréable de vous voir pleurer si longtemps. Je sais que les larmes ne tuent pas, et que certaines personnes, et particulièrement les femmes, se trouvent mieux pour en verser