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ignorant que ma nièce. Vous connaissez peu cette jeune fille, sergent, et vous n’avez aucune idée de son savoir ; mais si elle avait pu être à son aise avec vous, comme elle l’est avec ceux qu’elle connaît bien, vous vous seriez aperçu qu’il y a peu de maîtres d’école qui pussent voguer de conserve avec elle.

— C’est une bonne fille, une chère et bonne fille, — murmura le sergent, dont les yeux étaient remplis de larmes, — c’est un malheur pour moi de l’avoir si peu connue.

— Elle est trop savante pour Pathfinder, qui est un homme rempli de raison et un guide expérimenté à sa manière, mais qui n’a pas plus de connaissance des affaires humaines que vous n’en avez de la trigonométrie sphérique, sergent.

— Ah ! frère Cap, si Pathtinder avait été avec nous dans le bateau, cette triste affaire n’aurait pas eu lieu.

— Cela est possible ; car son plus cruel ennemi serait obligé de convenir qu’il n’y a pas un meilleur guide. Mais, sergent, puisque je suis obligé de vous dire la vérité, il faut convenir que vous avez conduit cette expédition tout de travers. Vous auriez dû mettre en panne à la hauteur du port, et envoyer un canot en reconnaissance comme je vous l’ai déjà dit. C’est un sujet de regret pour vous, et je vous en parle, parce que dans un pareil cas on doit dire la vérité.

— Mes erreurs seront chèrement payées, mon frère, et je crains que la pauvre Mabel n’en souffre. Je crois cependant que ce malheur n’aurait pas eu lieu si nous n’avions pas été trahis. Je crains, mon frère, que Jasper Eau-douce n’ait été le traître.

— C’est aussi mon opinion ; car cette vie sur l’eau douce doit finir par miner le moral d’un homme. Nous en parlions, le lieutenant Muir et moi, lorsque nous étions cachés dans notre trou, et nous étions d’avis l’un et l’autre que la trahison de Jasper avait contribué plus que toute autre chose à nous mettre dans ce bourbier. Sergent, il faut calmer votre esprit et songer à d’autres affaires ; car lorsqu’un bâtiment est sur le point d’entrer dans un port étranger, il est plus prudent de songer à l’ancrage que de repasser tous les événements qui sont arrivés pendant le voyage. Il existe un livre de loch tout exprès pour ces sortes de matières, et tout ce qui y est inscrit forme la colonne de chiffres qui doit déposer pour ou contre nous. — Mais vous voilà, Pathfinder ; qu’est-ce qu’il y a sous le vent, pour vous faire des-