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quoique celui de Mabel en soit un dans lequel tout homme pourrait aimer à lire, j’y ai vu peu de chose qui pût me donner une plus haute opinion de moi.

— Elle n’a pas osé vous refuser — refuser le plus ancien ami de son père ?

Pathfinder détourna le visage pour cacher l’angoisse qu’il sentait devoir s’y peindre, et lui répondit du ton calme qui lui était habituel :

— Mabel est trop polie pour faire un refus, ou pour dire une injure à un chien. D’ailleurs, je ne lui ai pas fait la question de manière à recevoir un refus direct.

— Et vous imaginez-vous que ma fille vous sauterait au cou avant de savoir quelles étaient vos intentions positives ? Si elle eût agi ainsi, elle n’aurait pas été la fille de sa mère, et je douterais qu’elle fût la mienne. Les Dunham aiment la franchise, mais ce ne sont pas des sauteurs. Laissez-moi conduire cette affaire, Pathfinder, et elle ne souffrira aucun délai inutile. Je parlerai à ma fille ce soir même, et je le ferai en votre nom, comme étant le principal intéressé.

— N’en faites rien sergent, n’en faites rien ; laissez cette affaire entre Mabel et moi, et je crois que nous finirons par nous entendre. Les jeunes filles sont des oiseaux craintifs ; elles n’aiment ni qu’on les presse trop, ni qu’on leur parle avec dureté. Laissez cette affaire entre Mabel et moi.

— J’y consens à une condition, Pathfinder ; et c’est que vous me promettrez, sur l’honneur d’un éclaireur, de lui parler clairement et sans détour à la première occasion convenable.

— Je le ferai, sergent ; oui, je le ferai, pourvu que vous me promettiez de ne pas vous mêler de cette affaire. À cette condition, je vous promets, oui, je vous promets de demander à Mabel si elle veut m’épouser, quand même elle devrait me rire au nez en entendant cette question.

Le sergent Dunham fit volontiers la promesse qui lui était demandée ; car il s’était fortement pénétré de l’idée qu’un homme qu’il estimait et qu’il respectait tellement lui-même, ne pouvait manquer d’être agréable à sa fille. Il avait épousé une femme beaucoup plus jeune que lui, et la différence d’âge entre Mabel et le guide n’était rien à ses yeux. Mabel avait une éducation fort supérieure à la sienne, et il ne sentait pas la différence que cette circonstance mettait entre le père et la fille : car c’est un