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si récemment dans notre voisinage ; cela ressemble étonnamment à une circonstance.

Tout en faisant cette question, le marin appuya doucement un pied sur celui du sergent, toucha le guide du coude et cligna de l’œil, quoique l’obscurité ne permît pas de voir ce signe.

— On l’a su parce que le Grand-Serpent a trouvé leur piste le lendemain matin ; et c’étaient les traces d’une botte militaire et d’un mocassin ; et un de nos chasseurs a vu ensuite la pirogue se diriger vers Frontenac.

— La piste conduisait-elle vers le fort, Jasper ? — demanda Pathfinder d’un ton si doux qu’il ressemblait à celui d’un écolier qui vient de recevoir une réprimande.

— Nous ne l’avons pas jugé ainsi, quoiqu’elle ne traversait pas la rivière. Nous la suivîmes jusqu’à la pointe orientale, à l’embouchure de la rivière, d’où l’on pouvait voir ce qui se passait dans le port.

— Et pourquoi n’avez-vous pas mis à la voile pour lui donner la chasse ? — demanda Cap. — Il faisait une bonne brise mardi matin, une brise à l’aide de laquelle ce cutter aurait pu filer neuf nœuds par heure.

— Cela peut se faire sur l’Océan, maître Cap, mais non sur l’Ontario. L’eau ne laisse pas de piste, et un Mingo ou un Français défierait le diable dans une chasse.

— Qu’a-t-on besoin de piste, quand on peut voir le bâtiment qu’on chasse ? — s’écria Cap, — et Jasper dit qu’on a vu la pirogue. Peu importerait qu’il y eût une vingtaine de vos Mingos et de vos Français, avec un bon bâtiment de construction anglaise dans leurs eaux. Je vous promets, maître Eau-Douce, que si vous m’aviez appelé ledit mardi matin, nous aurions bientôt atteint ces drôles.

— J’ose dire, maître Cap, que les avis d’un vieux marin tel que vous n’auraient pas fait de mal à un jeune marin comme moi ; mais c’est une longue chasse, une chasse sans espoir que celle d’une pirogue d’écorce.

— Vous n’auriez eu besoin que de le serrer de près pour le jeter à la côte.

— À la côte, maître Cap ! vous n’entendez aucunement notre navigation sur ce lac, si vous croyez facile de forcer une pirogue de se jeter à la côte. Pour peu qu’ils se trouvent pressés ; ils rament de toutes leurs forces dans la direction du vent, et avant