Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

terre, Jasper à une adresse peu commune, et l’on ne pourrait être mieux soutenu que par lui sur terre et sur eau. C’est ma propre faute, Mabel, s’il a gagné la calèche ; mais cela ne fait aucune différence, — pas la moindre, puisque la calèche a pris le bon chemin.

— Je crois que je vous comprends, Pathfinder, — dit Mabel, rougissant en dépit d’elle-même ; et je regarde la calèche comme un présent que je vous dois ainsi qu’à Jasper.

— Ce ne serait pas lui rendre justice, Mabel. Il a gagné la calèche, et il avait le droit de la donner. Tout ce que vous pouvez croire, c’est que, si je l’avais gagnée ; elle aurait été offerte à la même personne.

— Je m’en souviendrai, Pathfinder, et j’aurai soin que les autres connaissent votre adresse, comme vous venez d’en donner une preuve en ma présence sur ces pauvres oiseaux.

— Que le Seigneur vous protége, Mabel, vous n’avez pas plus besoin sur toute cette frontière de parler de ce que je puis faire avec un fusil, que de l’eau qui est dans le lac, ou du soleil qui brille dans le firmament. Chacun sait ce dont je suis capable à cet égard, et ce serait perdre vos paroles, comme si vous parliez français à un ours d’Amérique.

— Vous croyez donc que Jasper savait que vous lui faisiez un avantage dont il a profité avec si peu de délicatesse ? — dit Mabel, la couleur qui avait donné tant de lustre à ses yeux abandonnant ses joues peu à peu, et laissant à sa physionumie un air grave et pensif.

— Je ne dis pas cela ; j’en suis fort loin. Nous oublions toutes les choses que nous savons, quand nous ne songeons qu’à nos désirs. Jasper sait que je puis faire passer une balle à travers deux pommes de terre, comme je viens de le faire à travers ces deux oiseaux, et il sait aussi que personne sur cette frontière n’en peut faire autant. Mais ayant devant les yeux la calèche et l’espoir de vous en faire présent, il a été porté en ce moment à avoir une meilleure opinion de lui-même qu’il ne l’aurait peut-être dû. Non, non, il n’y a pas un atome de bassesse dans Jasper Eau-douce, quoique ce soit la nature de tous les jeunes gens de souhaiter de se rendre agréables aux yeux des jeunes et jolies filles.

— Je tâcherai d’oublier tout, excepté les bontés que vous avez eues tous deux pour une pauvre fille qui n’a plus de mère,