LXXVII
LA FEMME DU MARCHAND ET LE COMMIS
n marchand, vieux barbon, avait épousé une
jeune femme, et il avait plusieurs commis.
Son premier employé s’appelait Potap ; c’était un
beau gars ; il se mit à faire la cour à sa patronne,
à plaisanter avec elle, et il réussit à gagner ses
bonnes grâces. On le remarqua, on en parla au
marchand. Celui-ci dit à sa femme : « Écoute, mon
âme, les gens disent que tu vis avec le commis
Potap… — Allons donc, est-ce que je consentirais
à cela ? N’en crois pas les gens, crois-en tes
yeux ! — On dit qu’il s’est, depuis longtemps,
procuré tes faveurs ! Ne pourrait-on pas le mettre
à l’épreuve d’une façon quelconque ? — Eh
bien ! » reprend la femme, « écoute-moi ; affuble-toi
de mes vêtements, va le trouver dans le jardin
(tu sais où il loge), et dis-lui à voix basse : J’ai
quitté mon mari pour venir chez toi. Tu verras alors
ce qu’il dira. — Soit ! » répondit le marchand. La
jeune femme, profitant d’un moment propice, fit la
leçon au commis : « Quand mon mari viendra, »
lui dit-elle, « flanque-lui une bonne tripotée dont
le drôle se souvienne longtemps ! « Le marchand
attendit la nuit, s’habilla des pieds à la tête avec