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trompe, appelé Moffat. Quoique je n’eusse pas trop de quoi prendre un détour, je voulus pourtant l’aller voir, je ne sais pourquoi, car c’était une personne fort peu agréable, de trente à trente-cinq ans, laide, rouge, aigre et capricieuse au dernier point. Mais j’étais en si bonne disposition, et si content de la réception qu’on m’avait faite, que je ne voulais pas manquer une occasion de voir encore quelques-uns de ces bons Écossais que j’allais quitter pour un temps illimité. En effet je ne les ai pas revus depuis.

Je trouvai mademoiselle Wauchope, établie solitairement comme il convenait à son caractère. Elle fut sensible à ma visite et me proposa de retourner à Londres par les comtés de Cumberland et de Westmoreland. Un pauvre homme qu’elle protégeait se joignit à nous, et nous fîmes une course assez agréable. J’y gagnai de voir cette partie de l’Angleterre, que je n’aurais pas vue sans cela. Car j’ai une telle paresse et une si grande absence de curiosité que je n’ai jamais de moi-même été voir ni un monument, ni une contrée, ni un homme célèbre. Je reste où le sort me jette jusqu’à ce que je fasse un bond qui me place de nouveau dans une tout autre sphère.