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j’avais une sorte de répugnance pour le vin et de crainte de l’état où j’avais été pendant quelques heures. En conséquence, pendant tout le temps que j’avais passé à l’auberge de Thrapston, je n’avais bu que de l’eau. Cette abstinence peu usitée en Angleterre avait paru à mon hôte un vrai scandale. Ce ne fut pas lui qui m’apprit la mauvaise impression qu’il en avait reçue contre moi, ce fut l’homme qui m’avait précédemment loué un cabriolet, et que je fis venir pour tâcher de renouer avec lui cette négociation. Comme je me plaignis à lui de la conduite de son fils, il me répondit :

— Ah ! Monsieur, on dit de vous des choses si singulières !

Cela m’étonna fort et comme je le pressais :

— Vous n’avez pas bu une goutte de vin depuis que vous êtes ici, répliqua-t-il.

Je tombai de mon haut, je fis venir une bouteille de vin tout de suite, mais l’impression était faite, et il me fut impossible de rien obtenir. Pour le coup, il fallut me décider. Je louai de nouveau pour le lendemain un cheval sous prétexte d’aller à Wadenho voir si M. Bridges n’était pas arrivé. Le malheur voulut que, de deux che-