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humaine, qu’est-ce que de nous et de nos espérances !

Je vécus environ dix-huit mois à Édimbourg, m’amusant beaucoup, m’occupant assez et ne faisant dire que du bien de moi. Le malheur voulut qu’un petit Italien, qui me donnait des leçons de musique, me fît connaître une banque de pharaon que tenait son frère. Je jouai, je perdis, je fis des dettes à droite et à gauche, et tout mon séjour fut gâté.

Le temps que mon père avait fixé pour mon départ étant arrivé, je partis en promettant à mes créanciers de les payer, mais en les laissant fort mécontents et ayant donné contre moi des impressions très défavorables ; je passai par Londres où je m’arrêtai fort inutilement trois semaines, et j’arrivais à Paris dans le mois de mars 1783.

Mon père avait fait pour moi un arrangement qui m’aurait valu des agréments de tout genre si j’avais su et voulu eu profiter. Je devais loger chez M. Suard qui réunissait chez lui beaucoup de gens de lettres, et qui avait promis de m’introduire dans la meilleure société de Paris. Mais mon appartement n’étant pas prêt,