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ment, avant de saisir et d’embrasser l’inspiration de l’artiste. La première fois, l’âme est frappée du gracieux andante, ou du solennel adagio, mais elle ne comprend pas bien la transition des parties. La seconde fois, elle distingue dans le rondeau le chant d’un hautbois, ou le dialogue alterné des violons et de la flûte. Plus tard, elle s’éprend d’une mélodie élégante et simple qu’elle n’avait pas d’abord aperçue, et chaque jour elle fait de nouvelles découvertes : elle s’étonne de sa première ignorance, et la curiosité se rajeunit à mesure que la pénétration se développe.

Il n’y a dans le roman de Benjamin Constant que deux personnages ; mais tous deux, bien que vraisemblablement copiés, sont représentés par leur côté général et typique ; tous deux, bien que très-peu idéalisés, selon toute apparence, ont été si habilement dégagés des circonstances locales et individuelles, qu’ils résument en eux plusieurs milliers de personnages pareils.

Adolphe et Ellénore ne sont pas seulement réels, ils sont vrais dans la plus large acception du mot. Sans doute il eût été facile à une imagination plus active et plus exercée d’encadrer le sujet de ce roman dans une fable plus savante et plus vive, de multiplier les incidents, de nouer