Page:Constant - Adolphe.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.

homme dans la proscription, j’ai sauvé sa fortune ; je l’ai servi dans tous ses intérêts. Il peut se passer de moi maintenant : moi, je ne puis me passer de vous. On devine facilement quelles furent mes instances pour la détourner d’un projet que je ne concevais pas. Je lui parlai de l’opinion du public. Cette opinion, me répondit-elle, n’a jamais été juste pour moi. J’ai rempli pendant dix ans mes devoirs mieux qu’aucune femme, et cette opinion ne m’en a pas moins repoussée du rang que je méritais. Je lui rappelai ses enfants. — Mes enfants sont ceux de M. de P***. Il les a reconnus : il en aura soin. Ils seront trop heureux d’oublier une mère dont ils n’ont à partager que la honte. — Je redoublai mes prières. Écoutez, me dit-elle, si je romps avec le comte, refuserez-vous de me voir ? Le refuserez-vous ? reprit-elle en saisissant mon bras avec une violence qui me fit frémir. Non, assurément, lui répondis-je ; et plus vous serez malheureuse, plus je vous serai