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Je n’examine point jusqu’à quel point cette assertion est exacte. Il y a certainement beaucoup d’exceptions à faire, pour ce qui regarde l’antiquité.

Nous voyons souvent que des nations subjuguées ont continué à jouir de toutes les formes de leur administration précédente et de leurs anciennes lois. La religion des vaincus était scrupuleusement respectée. Le polythéisme, qui recommandait l’adoration des dieux étrangers, inspirait des ménagements pour tous les cultes. Le sacerdoce égyptien conserva sa puissance sous les Perses. L’exemple de Cambyse qui était en démence ne doit pas être cité ; mais Darius ayant voulu placer dans un temple sa statue devant celle de Sésostris, le grand-prêtre s’y opposa, et le monarque n’osa lui faire violence. Les Romains laissèrent aux habitants de la plupart des contrées soumises leurs autorités municipales, et n’intervinrent dans la religion gauloise que pour abolir les sacrifices humains.

Nous conviendrons cependant que les effets de la conquête étaient devenus très-doux depuis quelques siècles, et sont restés tels jusqu’à la fin du dix-huitième. C’est que l’esprit de conquête avait cessé. Celles de Louis XIV lui-même étaient plutôt une suite des prétentions et de l’arrogance d’un monarque orgueilleux que d’un véritable esprit conquérant. Mais l’esprit de conquête est ressorti des orages de la révolution française plus impétueux que jamais. Les effets des conquê-

    des quatre manières suivantes. Il continue à le gouverner selon ses lois, et ne prend pour lui que l’exercice du gouvernement politique et civil ; ou il lui donne un nouveau gouvernement politique et civil ; ou il détruit la société et la disperse dans d’autres ; ou enfin il extermine tous les citoyens. La première manière est conforme au droit des gens que nous suivons aujourd’hui : la quatrième est plus conforme au droit des gens des Romains. » Esprit des Lois, liv. X, ch. III.