à l’appontement, et puis je m’endormis enfin ! J’avais affronté le silence de l’Orient. J’avais entendu un peu de son langage. Mais quand je rouvris les yeux, le silence était aussi absolu que si rien n’était jamais venu le rompre. Je reposais dans un flot de lumière, et jamais le ciel ne m’avait auparavant semblé ni si loin, ni si haut. J’ouvris les yeux et demeurai étendu sans bouger.
« C’est alors que je vis les hommes de l’Orient, — ils me regardaient. Toute la longueur de l’appontement s’était remplie de gens. Je vis des visages bruns, bronzés, jaunes, des yeux noirs, l’éclat, la couleur d’une foule orientale. Et tous ces êtres nous regardaient fixement, sans un murmure, sans un soupir, sans un geste. D’en haut, ils regardaient les canots, les hommes assoupis qui, pendant la nuit, étaient venus vers eux de la mer. Rien ne bougeait. Les frondaisons des palmiers se dressaient immobiles contre le ciel. Pas une seule branche ne remuait le long de ce rivage, et les toits bruns des maisons s’apercevaient à travers le feuillage vert, à travers de larges feuilles qui pendaient, luisantes et immobiles, comme si elles eussent été faites de quelque lourd métal. C’était là l’Orient des anciens navigateurs, si vieux, si mystérieux, resplendissant et sombre, vivant et immuable, plein de dangers et de promesses. Et c’était là ses hommes. Je me redressai tout à coup. Une ondulation se propagea d’un bout