— « Jusqu’au bout, fis-je d’un ton saccadé… J’ai entendu ses derniers mots… » Je m’arrêtai, saisi.
— « Répétez-les, murmura-t-elle d’un ton accablé. Je veux, je veux avoir quelque chose avec quoi je puisse vivre… »
« Je fus sur le point de lui crier : « Mais ne les entendez-vous pas ? » L’obscurité autour de nous ne cessait de les répéter dans un chuchotement persistant, dans un chuchotement qui semblait s’enfler, de façon menaçante, comme le premier bruissement du vent qui se lève : « L’horreur ! L’horreur !… »
— « Son dernier mot : que j’en puisse vivre !… » reprit-elle. « Ne comprenez-vous donc pas que je l’aimais, je l’aimais, je l’aimais ! »
« Je me ressaisis et parlant lentement :
— « Le dernier mot qu’il ait prononcé : ce fut votre nom… »
« Je perçus un léger soupir et mon cœur ensuite cessa de battre, comme arrêté net par un cri exultant et terrible, un cri d’inconcevable triomphe et de douleur inexprimable : « Je le savais, j’en étais sûre !… » Elle savait. Elle était sûre. Je l’entendis sangloter : elle avait caché son visage dans ses mains. J’eus l’impression que la maison allait s’écrouler avant que je n’eusse le temps de m’esquiver, que le ciel allait choir sur ma tête. Mais rien de pareil. Les cieux ne tombent pas pour si peu.