C’était bien l’animal le plus mal équilibré que j’eusse jamais rencontré. Quand vous étiez près de lui, il gouvernait de l’air le plus important du monde, mais sitôt seul, il devenait la proie de la plus abjecte frousse, et en moins d’une minute tout contrôle sur cet éclopé de vapeur lui échappait.
« J’observais la sonde et j’étais fort ennuyé de constater qu’à chaque coup, un bout de plus en plus long dépassait de l’eau, quand je vis mon sondeur laisser tout en plan brusquement et se coucher à plat sur le pont sans même prendre la peine de retirer sa perche. Il ne l’avait pas lâchée cependant et elle continuait de traîner dans l’eau. En même temps, le chauffeur, que je découvrais en contre-bas, se mit précipitamment sur son séant devant la chaudière en enfonçant la tête entre les épaules. J’étais stupéfait, mais il me fallut reporter les yeux sur le fleuve sans retard parce qu’il y avait un tronc d’arbre sur notre route. Des bâtons, des petits bâtons volaient autour de nous, en nuées ; ils sifflaient à ma barbe, tombaient au-dessous de moi, heurtaient l’abri du pilote derrière mon dos. Et durant ce temps, le fleuve, le rivage, la forêt étaient calmes, parfaitement calmes. Je n’entendais que le lourd barbottement de notre roue à l’arrière et le bruit d’averse de ces choses qui volaient. — Tant bien que mal, nous évitâmes le tronc d’arbre. — Des flèches, bon sang ! On nous tirait dessus… Je rentrai vivement fer-