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ange est soutenu en l’air par deux grandes ailes ; il est vêtu d’une cuirasse faite d’écaillés d’or, où est attachée une espèce de soie de drap d’or à la romaine qui ne descend que jusqu’au genou ; il y en a un autre par-dessous d’une étoffe bleue qui déborde un peu, où, en forme de broderie, l’on voit écrit en lettres capitales, RAPHAEL URBINAS PINGEBAT M. D. XVII[1].

Par-dessous ces armes, il y a comme deux écharpes de couleur gris de lin, qui, étant agitées et soutenues par la force de l’air, s’élèvent en haut ; on voit que l’un des bouts est emporté comme avec plus de violence entre les deux ailes de l’ange, et que l’autre se soutient par sa légèreté naturelle.

Cet ange a une épée ceinte à son côté ; des deux mains il tient une demi-pique, mais, ayant le bras droit plus élevé, la main gauche paroît un peu retirée sous le bras droit, à cause que la partie d’en haut de tout le corps avance davantage que celle d’en bas. Sa jambe gauche est ployée, et quoique la droite semble appuyée sur le démon, néanmoins elle n’y touche pas.

Ses cheveux soutenus de l’air font un pareil mouvement que la draperie. Ses brodequins sont de couleur gris de lin de même que les écharpes qui l’environnent.

Le démon, qui est sous lui et comme écrasé, se mord la langue et grince les dents et l’on voit dans ses yeux rouges et enflammés les marques de sa rage et de sa fureur. Il est sur le bord d’un précipice et entre des rochers d’où sortent des flammes. Il a des cornes de bouc, des ailes de dragon et une queue de serpent. Il s’appuie de la main gauche contre terre, et tient de la droite un croc de fer qui lui sert de sceptre, et qui est la marque funeste de son cruel empire sur les autres démons.

M. le Brun, qui étoit chargé de faire des remarques sur ce tableau, observa d’abord la disposition de la figure de l’ange, qui est d’autant plus digne d’être considérée qu’elle représente un corps qui se soutient en l’air et d’une manière difficile à être bien représentée.

  1. Nous respectons le texte de Félibien qui a publie cette conférence, mais l’inscription dont il est parlé ici est inexactement relevée. Ce n’est pas M D XVII, mais bien M D XVIII qu’il faut lire.