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mettre leur imagination à la sienne, mais leur apprendre à faire usage de leur raison : et de tous les crimes, c’est celui que l’orgueil sacerdotal sait le moins pardonner.

Ce fut au pied du tombeau même de Socrate que Platon dicta les leçons qu’il avoit reçues de son maître.

Son style enchanteur, sa brillante imagination, les tableaux rians ou majestueux, les traits ingénieux et piquans, qui, dans ses dialogues, font disparoître la sécheresse des discussions philosophiques ; ces maximes d’une morale douce et pure, qu’il a su y répandre ; cet art avec lequel il met ses personnages en action et conserve à chacun son caractère ; toutes ces beautés que le temps et les révolutions des opinions n’ont pu flétrir, ont dû sans doute obtenir grâce pour les rêves philosophiques qui trop souvent forment le fond de ses ouvrages, pour cet abus des mots que son maître avoit tant reproché aux sophistes, et dont il n’a pu préserver le plus grand de ses disciples.

On est étonné, en lisant ses dialogues,