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familles, si sur-tout des castes particulières n’en avoient fait le premier fondement de leur gloire ou de leur puissance.

On avoit déjà pu joindre l’observation de l’homme et des sociétés à celle de la nature. Déjà un petit nombre de maximes de morale pratique et de politique, se transmettoient de générations en générations : ces castes s’en emparèrent ; les idées religieuses, les préjugés, les superstitions accrurent encore leur domaine. Elles succédèrent aux premières associations, aux premières familles des charlatans et des sorciers : mais elles employèrent plus d’art pour séduire des esprits moins grossiers. Leurs connoissances réelles, l’austérité apparente de leur vie, un mépris hypocrite pour ce qui est l’objet des désirs des hommes vulgaires, donnèrent de l’autorité à leurs prestiges, tandis que ces mêmes prestiges consacroient, aux yeux du peuple, et ces foibles connoissances et ces hypocrites vertus. Les membres de ces sociétés suivirent d’abord, avec une ardeur presque égale, deux objets bien différens ; l’un d’acquérir pour eux-mêmes de nouvelles connoissances ; l’autre, d’employer celles