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des cultes plus réguliers, des systêmes de croyance moins grossièrement combinés. Les idées des puissances surnaturelles se raffinèrent en quelque sorte : et à côté de ces opinions, on vit s’établir ici des princes pontifes, là des familles ou des tribus sacerdotales, ailleurs des colléges de prêtres ; mais toujours une classe d’individus affectant d’insolentes prérogatives, se séparant des hommes pour les mieux asservir, et cherchant à s’emparer exclusivement de la médecine, de l’astronomie, pour réunir tous les moyens de subjuguer les esprits, pour ne leur en laisser aucun de démasquer son hypocrisie, de briser ses fers.

Les langues s’enrichirent sans devenir moins figurées ou moins hardies. Les images qu’elles employoient furent plus variées et plus douces : on les prit dans la vie pastorale, comme dans celle des forêts, dans les phénomènes réguliers de la nature, comme dans ses bouleversemens. Le chant, les instrumens, la poésie se perfectionnèrent dans un loisir qui les soumettoit à des auditeurs plus paisibles, et dès-lors plus difficiles, qui permettoit d’observer ses