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Une telle langue n’a pas l’inconvénient d’un idiome scientifique, différent du langage commun. Nous avons observé déjà, que l’usage de cet idiome partageroit nécessairement les sociétés en deux classes inégales entre elles ; l’une composée des hommes qui, connoissant ce langage, auroient la clef de toutes les sciences ; l’autre de ceux qui, n’ayant pu l’apprendre, se trouveroient dans l’impossibilité presque absolue d’acquérir des lumières. Ici, au contraire, la langue universelle s’y apprendroit avec la science même, comme celle de l’algèbre ; on connoîtroit le signe en même-temps que l’objet, l’idée, l’opération qu’il désigne. Celui qui ayant appris les élémens d’une science, voudroit y pénétrer plus avant, trouveroit dans les livres, non-seulement les vérités qu’il peut entendre à l’aide des signes dont il connoît déjà la valeur, mais l’explication des nouveaux signes dont on a besoin pour s’élever à d’autres vérités.

Nous montrerons que la formation d’une telle langue, si elle se borne à exprimer des propositions simples, précises, comme celles qui forment le systême d’une science,