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tement prononcés, les plus généraux, ayant été tracés, les plus énergiques passions, leurs expressions les plus naturelles ou les plus vraies, les vérités les plus imposantes, les images les plus brillantes ayant été mises en œuvre, les arts sont condamnés, quelque fécondité qu’on suppose dans leurs moyens, à l’éternelle monotonie de l’imitation des premiers modèles.

Nous ferons voir que cette opinion n’est qu’un préjugé, né de l’habitude qu’ont les littérateurs et les artistes de juger les hommes au lieu de jouir des ouvrages ; que si l’on doit perdre de ce plaisir réfléchi, produit par la comparaison des productions des différens siècles ou des divers pays, par l’admiration qu’excitent les efforts ou les succès du génie, cependant les jouissances que donnent ces productions, considérées en elles-mêmes, doivent être aussi vives, quand même celui à qui on les doit auroit eu moins de mérite à s’élever jusqu’à cette perfection. À mesure que ces productions, vraiment dignes d’être conservées, se multiplieront, deviendront plus parfaites, chaque généra-