Page:Condorcet Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.
(24)

désir de vengeance contre les ennemis de la peuplade, en devenoient la conséquence nécessaire.

Le besoin d’un chef, afin de pouvoir agir en commun, soit pour se défendre, soit pour se procurer avec moins de peine une subsistance plus assurée et plus abondante, introduisit dans ces sociétés les premières idées d’une autorité politique. Dans les circonstances où la peuplade entière étoit intéressée, où elle devoit prendre une résolution commune, tous ceux qui avoient à l’exécuter devoient être consultés. La foiblesse des femmes, qui les excluoit des chasses éloignées et de la guerre, objets ordinaires de ces délibérations, les en fit éloigner également. Comme ces résolutions exigeoient de l’expérience, on n’y admettoit que ceux à qui l’on pouvoit en supposer. Les querelles qui s’élevoient dans le sein d’une même société en troubloient l’harmonie ; elles auroient pu la détruire : il étoit naturel de convenir que la décision en seroit remise à ceux qui, par leur âge, par leurs qualités personnelles, inspiroient le plus de confiance. Telle fut l’origine des premières institutions politiques.