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changer n’étoit pas la première garantie de tous les autres, comme si les institutions humaines, nécessairement défectueuses et susceptibles d’une perfection nouvelle à mesure que les hommes s’éclairent, pouvoient être condamnées à une éternelle durée. Ainsi, l’on se vit obligé de renoncer à cette politique astucieuse et fausse, qui, oubliant que tous les hommes tiennent des droits égaux de leur nature même, vouloit tantôt mesurer l’étendue de ceux qu’il falloit leur laisser, sur la grandeur du territoire, sur la température du climat, sur le caractère national, sur la richesse du peuple, sur le degré de perfection du commerce et de l’industrie ; et tantôt partager avec inégalité ces mêmes droits entre diverses classes d’hommes, en accorder à la naissance, à la richesse, à la profession, et créer ainsi des intérêts contraires, des pouvoirs opposés, pour établir ensuite entre eux un équilibre que ces institutions seules ont rendu nécessaire, et qui n’en corrige même pas les influences dangereuses.

Ainsi, l’on n’osa plus partager les hommes en deux races différentes, dont l’une est