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même niveau, qui en préparent les progrès, tous ces matériaux que le temps amasse, et qui attendent le génie, restoient condamnés à une éternelle obscurité. Ce concert des savans, cette réunion de leurs forces si utile, si nécessaire même à certaines époques, n’existoit pas. Il falloit que le même individu pût commencer et achever une découverte ; et il étoit obligé de combattre seul toutes les résistances, que la nature oppose à nos efforts. Les ouvrages qui facilitent l’étude des sciences, qui en éclaircissent les difficultés, qui en présentent les vérités sous des formes plus commodes et plus simples, ces détails des observations, ces développemens qui souvent éclairent sur les erreurs des résultats, et où le lecteur saisit ce que l’auteur n’a point lui-même apperçu ; ces ouvrages n’auroient pu trouver ni copistes, ni lecteurs.

Il étoit donc impossible que les sciences, déjà parvenues à une étendue qui en rendoit difficiles, et les progrès, et même l’étude approfondie, pussent se soutenir d’elles-mêmes, et résister à la pente qui les entraînoit rapidement vers leur décadence. Ainsi