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ouverte à tous ceux que leur penchant naturel porte vers l’étude : et telle étoit à Rome celle de la jurisprudence.

Quand les lois, comme dans l’Orient, sont liées à la religion, le droit de les interpréter devient un des plus forts appuis de la tyrannie sacerdotale. Dans la Grèce, elles avoient fait partie de ce code donné à chaque ville par son législateur : il les y avoit liées à l’esprit de la constitution et du gouvernement qu’il avoit établi. Elles y éprouvèrent peu de changemens. Souvent les magistrats en abusèrent : les injustices particulières furent fréquentes ; mais les vices des lois n’y conduisirent jamais à un systême de brigandage régulier et froidement calculé. À Rome, où long-temps on ne connut d’autre autorité que la tradition des coutumes, où les juges déclaroient, chaque année, d’après quels principes ils décideroient les contestations pendant la durée de leur magistrature, où les premières lois écrites furent une compilation des lois grecques, rédigée par des décemvirs plus occupés de conserver leur pouvoir que de l’honorer, en présentant une bonne législation ; à Rome,