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qu’elle devoit cette puissance qui étonne les nations amollies. Voyez même les peuples de l’Asie avant Cyrus. Ils avoient des vices, ils connoissoient le faste ; mais le luxe n’avoit pas encore répandu son poison mortel sur toutes les parties de la société. Si la magnificence se montroit dans des trésors qu’on amassoit pour le besoin, dans de grandes entreprises, dans des travaux aussi vastes qu’utiles ; si elle se montroit dans les meubles, dans l’habillement, au moins ne connoissoit-on pas toutes nos commodités, et on connoissoit moins encore toutes les frivolités, dont nous n’avons pas honte de nous faire autant de besoins. Le luxe même de la table, quel qu’il fût, n’avoit lieu que dans des festins d’apparat. Il consistoit dans l’abondance plutôt que dans la délicatesse. Ce n’étoit pas deux fois par jour, jusques dans les maisons des particuliers, une profusion de mets, apprêtés