Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/280

Cette page n’a pas encore été corrigée

de moi, continuer à le voir de la même grandeur. Pourquoi diminuera-t-il plus vîte à mes yeux qu’à ceux d’un autre, quoique nous ayons la même expérience ? Enfin qu’on désigne à quel point de distance, ce jugement doit commencer à perdre de sa force ?

§. 9. Ceux que je combats, comparent le sens de la vûe à celui de l’ouïe, & concluent de l’un à l’autre. Par les sons, disent-ils, l’oreille est frappée ; on entend des tons & rien de plus : par la vûe, l’oeil est ébranlé ; on voit des couleurs & rien de plus. Celui qui pour la première fois de sa vie entendroit le bruit du canon, ne pourroit juger, si on tire ce canon à une lieuë, ou à trente pas. Il n’y a que l’expérience qui puisse l’accoutumer à juger de la distance qui est entre lui & l’endroit d’où part ce bruit. C’est la même chose précisément par rapport aux rayons de lumière, qui partent d’un objet ; ils ne nous apprennent point du tout où est cet objet.

§. 10. L’ouïe par elle-même n’est