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sont de l’eau ; si un foetus monstrueux est un homme ; si Dieu, les esprits, les corps, ou même le vuide sont des substances : il est évident que la question n’est pas si ces choses conviennent avec les idées simples rassemblées sous ces mots, eau, homme, substance ; elle se résoudroit d’elle-même. Il s’agit de sçavoir si ces choses renferment certaines essences, certaines réalités qu’on suppose que ces mots, eau, homme, substance signifient.

§. 8. Ce préjugé a fait imaginer à tous les philosophes qu’il faut définir les substances par la différence la plus prochaine & la plus propre à en expliquer la nature. Mais nous sommes encore à attendre d’eux un exemple de ces sortes de définitions. Elles seront toujours défectueuses par l’impuissance où ils sont de connoître les essences : impuissance dont ils ne se doutent pas, parce qu’ils se préviennent pour des idées abstraites qu’ils réalisent, & qu’ils prennent ensuite pour l’essence même des choses.

§. 9. L’abus des notions abstraites