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pour suppléer à l’absence des choses. N’ayant qu’une imagination dont il ne pourroit disposer, ses perceptions ne se réveilleroient, qu’autant que le hazard lui présenteroit un objet avec lequel quelques circonstances les auroient liées : enfin sans réflexion, il recevroit les impressions que les choses feroient sur ses sens, & ne leur obéiroit que par instinct. Il imiteroit les ours en tout, auroit un cri à peu près semblable au leur, & se traîneroit sur les pieds & sur les mains. Nous sommes si fort portés à l’imitation, que peut-être un Descartes, à sa place, n’essayeroit pas seulement de marcher sur ses pieds.

§. 20. mais quoi ! Me dira-t-on, la nécessité de pourvoir à ses besoins, & de satisfaire à ses passions, ne suffira-t-elle pas pour développer toutes les opérations de son ame ?

Je réponds que non ; parce que tant qu’il vivra sans aucun commerce avec le reste des hommes, il n’aura point occasion de lier ses idées à des signes arbitraires. Il sera