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§. 18. Il semble que pour savoir ce que c’est que la vie, ce soit assez d’être & de se sentir. Cependant, au hazard d’avancer un paradoxe, je dirai que ce jeune homme en avoit à peine une idée. Pour un être qui ne réfléchit pas, pour nous-mêmes, dans ces momens où, quoiqu’éveillés, nous ne faisons, pour ainsi dire, que végéter, les sensations ne sont que des sensations, & elles ne deviennent des idées que lorsque la réflexion nous les fait considérer comme images de quelque chose. Il est vrai qu’elles guidoient ce jeune homme dans la recherche de ce qui étoit utile à sa conservation, & l’éloignement de ce qui pouvoit lui nuire : mais il en suivoit l’impression sans réfléchir sur ce que c’étoit que se conserver, ou se laisser détruire. Une preuve de la vérité de ce que j’avance, c’est qu’il ne savoit pas bien distinctement ce que c’étoit que la mort. S’il avoit su ce que c’étoit que la vie, n’auroit-il pas vu aussi distinctement que nous,