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et M. de Montbrun ne veut pas qu’Angéline se marie avant d’avoir vingt ans. Pour moi, je passerai probablement ici la plus grande partie de l’absence de mon frère. Il le désire, et ma belle petite sœur m’en presse très fort.

Pauvres enfants ! la pensée du départ les assombrit beaucoup, ce qui me rassure. Chose étrange, le bonheur fait peur. Il me semblait toujours qu’il allait arriver quelque chose. C’est bien singulier, mais Angéline m’inspire souvent une pitié qui ne peut se dire. Je la trouve trop belle, trop charmante, trop heureuse, trop aimée.

Vous comprenez qu’ici nous sommes bien loin de l’illusion des amitiés de la terre, qui s’en vont avec les années et les intérêts. Vraiment, j’ai beau regarder, je ne vois point le grain noir, comme disent les marins. Le bonheur serait-il de ce monde ? Il est vrai que son père ne cherche pas du tout à lui épargner les petites contrariétés de chaque jour. Il l’assujettit fort bien à son devoir. Mais qu’est-ce que cela ? Rien qu’à la regarder, on voit qu’elle ne connaît pas