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souillure, la salutaire amertume des premiers remords.

Oublier l’âpre et fortifiante saveur du renoncement ; les joies profondes, les religieuses terreurs de la foi.

Oublier les aspirations vers l’infini, la douceur bénie des larmes, les rêves délicieux de l’âme virginale, les premiers regards jetés sur l’avenir, ce lointain enchanté qu’illuminait l’amour.

Oublier les joies sacrées du cœur, les déchirements sanglants et les illuminations du sacrifice, les révélations de la douleur.

Oublier les clartés d’en haut ; les rayons qui s’échappent de la tombe ; les voix qui viennent de la terre, quand ce qu’on aimait le plus y a disparu.

Oublier qu’on a été l’objet d’une incomparable tendresse ; qu’on a cru à l’immortalité de l’amour.

Oublier que l’enthousiasme a fait battre le cœur ; que l’âme s’est émue devant la beauté de la nature ; qu’elle s’est attendrie sur la fleur saisie par le froid, sur le nid où tombait la neige, sur le ruisseau qui coulait entre les arbres dépouillés.