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ne suis plus le même homme. Cette vive jeunesse, cette plénitude de vie, je ne les retrouve plus. Dites-moi, sentiez-vous quelque chose de l’épanouissement qui se faisait dans mon âme quand je vous apercevais ?

Que vous êtes bonne de me regretter, de m’attendre ! Mais ne vous déplaise, il est bien inutile que la nature se mette en frais pour mon arrivée. Je n’en verrais pas grand chose. Que les cataractes du ciel s’ouvrent, que les vents rugissent, tout m’est égal, pourvu que je ne sois pas retardé, pourvu que j’arrive.

J’ai écrit à votre père. Jamais je ne pourrai assez le remercier, assez l’aimer et pourtant qu’il m’est cher !

Je vous envoie un brin de réséda arraché à la terre de France. Pauvre France ! Ne sommes-nous pas un peu fous de tant l’aimer. Ce bateau qui m’a transporté à Calais me semblait aller bien lentement. Debout, sur le pont, je regardais avec une curiosité ardente, pleine de joie, et lorsque j’aperçus la terre, la terre de France, je vous avoue que tout mon sang frémit.