élus. Mon supérieur m’envoie vous le dire et vous annoncer que, demain, nous partons pour Dieppe, où nous prendrons le vaisseau qui doit, au premier bon vent, faire voile vers le Canada.
M. de Champlain exprima sa satisfaction et, d’un geste courtois, invitant le P. de Brébeuf à reprendre son fauteuil : — Je vous suivrai bientôt, mon Père, dit-il, s’asseyant en face de lui.
Et, tout en causant du départ prochain, de la traversée alors si rude, il examina attentivement celui que la Compagnie de Jésus avait choisi pour porter l’Évangile chez les terribles sauvages du Canada.
Sa tête pâle, sereine, respirait la force tranquille. Sur ce mâle visage, labouré de rides précoces, les souffrances de la nature domptée avaient laissé leurs traces ; mais la transparence du bonheur intérieur les adoucissait, les embellissait. On sentait que le travail contre soi-même n’offrait plus de difficultés à ce jésuite. La joie du sacrifice illuminait son front paisible, un peu dépouillé par la maturité de la jeunesse ; et, chaque fois qu’il était question du départ, ses yeux doux et clairs rayonnaient.
Champlain avait le regard qui sait voir un grand caractère, et se dit bientôt : Ces jésuites ont du coup-d’œil ; il est trempé pour le combat obscur et sanglant.