les joies de ma vie s’évanouissent devant ce que j’éprouvai en entendant sonner l’Angelus, pour la première fois, dans la Nouvelle-France. Cette voix de la prière s’élevait si touchante dans ce pays sauvage ! En l’écoutant, je ne sais quoi s’émut au plus profond de mon cœur ; et, tombant à genoux, je pleurai avec un bonheur inconcevable. Cher ami, le beau moment ! Je sentais que la sainte Vierge bénissait la colonie… qu’elle s’attendrissait sur cette terre idolâtre et y ferait partout adorer Jésus-Christ… Quand je me relevai, il me semblait que toutes les voix de la solitude chantaient : Salut, Reine ! Salut, Vierge ! Salut, Mère !
S’apercevant qu’il parlait avec une émotion peu ordinaire, Champlain se tut brusquement. Un peu après, il reprit avec calme : — Aussi, ai-je ordonné que l’Angelus fût sonné régulièrement, et je ne l’entends jamais sans émotion et sans joie.
— Mon ami, dit le magistrat, il y a des émotions qui comptent pour ce monde et pour l’autre.
M. de Champlain ne répliqua rien ; mais, après avoir un peu marché en silence, il dit, regardant autour de lui : — Ces maisons de campagne, près des grandes villes, ont un charme incomparable. C’est comme un jardin sur les bords de l’Océan.
— En effet, dit M. Garnier, il me semble que le