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Gisèle Méliand se leva du fond de la tribune où elle s’était dérobée aux regards.

Son beau front sérieux rayonnait encore d’inspiration, et tout en elle respirait une indicible sérénité.

Un instant, elle s’arrêta à regarder dans la nef où un brillant soleil d’hiver répandait partout un air joyeux.

Puis elle descendit l’escalier, traversa l’église et se dirigeant vers une dame en deuil qui restait absorbée dans sa prière, s’agenouilla à côté d’elle.

Madame Garnier — car c’était elle — releva la tête.

— Oh, Gisèle, que vous avez bien chanté ! murmura-t-elle. Et levant son voile noir, elle découvrit son visage encore mouillé de pleurs.

— Voulez-vous passer au parloir ? demanda doucement Gisèle ; nous pourrons voir le P. Jogues… Le P. supérieur me l’a promis.

Madame Garnier appuya le front sur ses mains et resta quelques minutes sans répondre, puis relevant la tête :

— Non, dit-elle enfin, sans doute, je serais bienheureuse de parler à ce missionnaire qui l’a vu… mais je ne me sens pas la force de voir de si près les marques de la cruauté des sauvages. Allez-y seule… je vous attendrai ici.