du père qui a enfanté des fils ingrats. Contemplant ce peuple toujours infidèle, énumérant les lâchetés, les obstinations, les refus, les ignorances coupables, les perversités renaissantes, hélas ! les apostasies, et, pour ainsi dire, le sang de Jésus devenu presque infécond par l’effet de la malice humaine, il baissera la tête et il entendra dans son cœur un écho de l’éternel gémissement des envoyés de Dieu : Curavimus Babylonem et non est sanata ! Ainsi s’achèveront ses jours fanés presque dès leur aurore : Dies mei sicut umbra declinaverunt et ego sicut fœnum arui. Ainsi il attendra que son pied se heurte à la pierre où il doit tomber, que sa vie s’accroche à la ronce où elle doit rester suspendue, une masure, une cachette au fond des bois, un fossé sur la route. Car le cimetière même, cet asile dans la terre consacrée, le missionnaire ne l’a pas toujours ; trouvant à mourir jusque dans la mort, il se dépouille aussi du tombeau.
« Telle est la vie du missionnaire. Suivant la nature, elle est incompréhensible et c’est trop peu de l’appeler une lente et formidable mort. Qui nous expliquera pourquoi il se trouve toujours des hommes pour se consumer dans cet obscur et sanglant travail ; des hommes qui désirent cette vie, qui la cherchent, qui l’ont rêvée enfants, et qui,