chent dans ces hautes herbes. Mes chères filles, songez-vous donc à nous affliger, votre grand’mère et moi ?
Elles se rapprochèrent spontanément et lui prirent chacune une main.
— Pardonnez-nous ! ajoutèrent-elles.
— Certes, je vous pardonne, puisque vous sentez votre faute. Vos visages tristes me révèlent assez votre contrariété ; il faut demeurer à Saulieu et vous vous trouvez malheureuses ! Malheureuses ici ! Oh ! si vous connaissiez le monde, combien vous chéririez cette douce retraite, combien vous craindriez de la quitter jamais !
— Pourtant, ma bonne amie, on vit dans le monde, on s’y amuse, on s’y plaît…
— Et l’on y souffre ! et l’on n’aspire qu’à le fuir ; croyez-moi, mes enfants, remerciez Dieu qui vous a donné ce beau nid pour vous abriter, restez-y le plus longtemps possible, restez-y toujours.
— Mais, madame, ma grand’mère a passé la plus grande partie de sa vie à Paris, mais ma mère y est née, y a été élevée, n’est-ce pas ?
— Votre grand’mère, ma chère Isabelle, a fui ce lieu de malheur, et ne l’a jamais voulu revoir ; votre mère, depuis son mariage, est restée ici.
— Alors pourquoi parlait-on de nous y conduire, si l’on y a tant à craindre ?
La gouvernante parut un instant embarrassée de la naïveté de Béatrix, elle hésita à répondre.