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ment à l’abri de ces tourelles pointues, sous ces grands écussons de pierre et ces hautes croisées de dentelles solides, soutenues de monstres curieux. Un grand nombre de domestiques allaient et venaient à travers les portiques, tous les visages étaient satisfaits, nul ne semblait souffrir.

Deux jeunes filles se promenaient lentement au bord de la Vive, en dehors du parc : leurs regards se tournaient sans cesse derrière elles, comme si elles craignaient d’être observées ; craintives et charmées pourtant, elles se pressaient l’une contre l’autre et parlaient tout bas. L’aînée avait dix-neuf ans, la cadette une année de moins à peu près. Toutes deux de la même taille ; il régnait dans leurs traits une ressemblance évidente, bien que la première fût brune et la plus jeune blonde. En les voyant marcher, vêtues absolument de même, du si joli costume de ce temps de Louis XIII, il devenait impossible de les distinguer : c’était la même grâce, la même élégance ; la manière dont elles s’appuyaient l’une sur l’autre indiquait une confiance entière, une affection sans bornes. Elles causaient sérieusement, un chagrin pesait sur elles, un de ces naïfs chagrins de cet age qui nous accablent et nous brisent presque autant que le font plus tard les graves événements de la vie.

— Oui, ma sœur, disait la plus jeune, je l’ai vu, ma grand’mère l’a reçu dans son cabinet, elle a fait appeler madame Legrand, ils se sont enfermés tous les trois,