Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 032, 1851.djvu/146

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(136)

» Telles sont les conditions idéales dans lesquelles le mouvement de rotation du globe deviendrait évidemment accessible à l’observation. Mais en réalité on est matériellement obligé de prendre un point d’appui sur un sol mouvant ; les pièces rigides où s’attache l’extrémité supérieure du fil du pendule ne peuvent être soustraites au mouvement diurne, et l’on pourrait craindre, à première vue, que ce mouvement communiqué au fil et à la masse pendulaire n’altérât la direction du plan d’oscillation. Toutefois la théorie ne montre pas là une difficulté sérieuse, et, de son côté, l’expérience m’a montré que, pourvu que le fil soit rond et homogène, on peut le faire tourner assez rapidement sur lui-même dans un sens ou dans l’autre sans influer sensiblement sur la position du plan d’oscillation, en sorte que l’expérience telle que je viens de la décrire doit réussir au pôle dans toute sa pureté[1].

» Mais quand on descend vers nos latitudes, le phénomène se complique d’un élément assez difficile à apprécier et sur lequel je souhaite bien vivement d’attirer l’attention des géomètres.

» À mesure que l’on approche de l’équateur, le plan de l’horizon prend sur l’axe de la terre une position de plus en plus oblique, et la verticale, au lieu de tourner sur elle-même comme au pôle, décrit un cône de plus en plus ouvert ; il en résulte un ralentissement dans le mouvement apparent du plan d’oscillation, mouvement qui s’annule à l’équateur pour changer de sens dans l’autre hémisphère. Pour déterminer la loi suivant laquelle varie ce mouvement sous les diverses latitudes, il faut recourir soit à l’analyse, soit à des considérations mécaniques et géométriques que ne comporte pas l’étendue restreinte de cette Note ; je dois donc me borner à énoncer que les deux méthodes s’accordent, en négligeant certains phénomènes secondaires, à montrer le déplacement angulaire du plan d’oscillation comme devant être égal au mouvement angulaire de la terre dans le même temps multiplié par le sinus de la latitude. Je me suis donc mis à l’œuvre avec

  1. L’indépendance du plan d’oscillation et du point de suspension peut être rendue évidente par une expérience qui m’a mis sur la voie et qui est très-facile à répéter. Après avoir fixé, sur l’arbre d’un tour et dans la direction de l’axe, une verge d’acier ronde et flexible, on la met en vibration en l’écartant de sa position d’équilibre et en l’abandonnant à elle-même. Ainsi l’on détermine un plan d’oscillation qui, par la persistance des impressions visuelles, se trouve nettement dessiné dans l’espace ; or on remarque qu’en faisant tourner à la main l’arbre qui sert de support à cette verge vibrante, on n’entraîne pas le plan de vibration.