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PERDU DANS LA FORÊT

part. Heureusement pour moi, Ploute était un Indien sobre, chose assez rare, car autrement je serais resté en panne dans l’endroit. Plusieurs voisins vinrent fumer la pipe et prendre un coup, et ce fut une noce au gin. Toute la place suintait et sentait le genièvre, ce que je constatai d’autant plus que je n’en use pas moi-même.

La plupart des habitants alors logeaient dans de petites maisons, et ce que l’on y trouvait comme lits suffisait juste aux besoins de la famille ; quant aux survenants, ils pouvaient jouir de tout l’espace qu’ils désiraient occuper sur le plancher. Généralement on se faisait un oreiller de son paletot ou de son sac et l’on s’allongeait sur les planches les moins raboteuses qu’il y avait tout près du poêle, quelques-uns, des gens « de moyens » étendaient des couvertes ou une paillasse ou, par exception, un lit de plume. Quand ces effets étaient étendus sur le parquet et que l’on se mettait les pieds au poêle, on se trouvait confortablement accommodé.

Souvent, après une journée passée au dehors, en rentrant tout mouillé par la neige ou tout en transpiration, on appréciait fort le poêle chaud qui vous permettait de vous sécher. Un lit au froid dans un coin isolé de la maison, non seulement n’était pas confortable, à pareille saison, mais vous exposait aussi à des résultats sérieux.

Une lampe à l’huile de loup-marin suspendue à une poutre restait ordinairement à brûler toute la nuit, en répandant une lumière blafarde, qui vous permettait de circuler sans marcher sur les dormeurs. Près de la porte, il y avait une petite tablette ou une table grossière, qui servait de lave-mains. À côté, étaient accrochés à une cheville ou à un crochet un seau d’eau et une tasse de ferblanc. Quiconque le voulait, pouvait se lever à toute heure de la nuit,