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à Blackwater-Park, a été retracée avec une étonnante exactitude, une profonde perspicacité mentale, par Marian elle-même. (Qu’on me passe l’enivrante familiarité avec laquelle je me plais à désigner cette sublime créature !) La connaissance exacte que j’ai prise de ce que renfermait son Journal — je m’en étais procuré la lecture par des moyens clandestins, au souvenir desquels j’attache un prix indicible, — détourne ma plume ardente de sujets complètement épuisés par celle qui se les est appropriés la première.

Les intérêts, — palpitants, immenses ! — auxquels je m’attache, en ce moment, ont leur point de départ dans cette déplorable maladie qui vint saisir Marian.

La situation, à cette époque, était d’une gravité qu’on ne saurait exagérer. Percival avait besoin de sommes considérables pour parer à des échéances fixes (je ne dis rien de la bagatelle qui m’était également nécessaire) ; et l’unique source d’où il fût possible de les tirer était la fortune de sa femme, fortune dont pas un seul « farthing » n’était à la disposition de Percival, à moins qu’il ne devînt veuf. Jusque-là, on le voit, les choses allaient mal ; elles étaient encore pires, examinées de plus près. Mon regrettable ami avait personnellement des inquiétudes secrètes, que la délicatesse de mon dévouement désintéressé, m’empêcha longtemps de vouloir approfondir. Tout ce que j’en savais, c’était qu’une femme nommée Anne Catherick se cachait dans le voisinage ; qu’elle communiquait avec lady Glyde ; et que ces communications pouvaient avoir pour résultat la découverte d’un secret qui, très-certainement, ruinerait sir Percival ; il m’avait dit lui-même qu’il se regardait comme perdu, à moins qu’on ne découvrît Anne Catherick et qu’on ne fît taire sa femme. Si réellement il était perdu, qu’adviendrait-il de nos intérêts pécuniaires ? Malgré mon intrépidité naturelle, cette idée me faisait vraiment trembler !

Toute la puissance de mon esprit fut désormais consacrée à retrouver Anne Catherick. Nos affaires d’argent, si importantes qu’elles fussent, pouvaient être ajournées ; mais la nécessité de découvrir cette femme n’ad-