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venable ; mais une ou deux fois ils pressèrent le pas comme s’ils voulaient me rattraper ; — puis ils s’arrêtaient, — tenaient conseil, — et reprenaient leur ancienne position. Ils avaient en vue, bien certainement, quelque objet spécial, et semblaient hésiter, ou n’être pas d’accord sur les meilleurs moyens d’y arriver. Je ne pouvais deviner exactement ce qu’ils prétendaient faire ; mais je doutais fort d’arriver à Knowlesbury sans avoir couru quelque danger sur le chemin. Mes soupçons, à cet égard, se réalisèrent.

Je venais d’aborder un endroit où la route, passablement déserte, formait à quelque distance un brusque détour, et, basant mes calculs sur le temps écoulé, je pensais devoir être assez près de la ville, lorsque j’entendis, tout à coup, dans mon voisinage immédiat, le pas des deux hommes.

Avant que j’eusse pu tourner la tête, l’un d’eux (le même qui, à Londres, m’avait suivi) passa rapidement à ma gauche, et me heurta de l’épaule. Je m’étais irrité, plus que je ne m’en doutais moi-même, d’avoir eu toujours derrière moi, depuis mon départ du Vieux-Welmingham, ces menaçants compagnons ; et, par malheur, je me laissai aller à écarter rudement, de ma main ouverte, celui qui venait ainsi se frotter à moi. Il cria tout aussitôt au secours. Son camarade, le grand gaillard habillé en garde-chasse, sauta immédiatement à ma droite, — et, la seconde d’après, ces deux coquins me tenaient entre eux, les deux bras pris, au milieu de la route. La conviction qu’un piège m’avait été tendu, et le dépit de voir que j’y étais tombé, m’empêchèrent heureusement d’aggraver ma situation par une lutte inutile avec ces deux hommes, dont un seul, selon toute probabilité, aurait suffi pour me maîtriser malgré mes efforts. Je réprimai donc le premier mouvement, bien naturel, par lequel j’allais essayer de me dépêtrer, et je regardai autour de moi pour m’assurer s’il n’y avait pas, dans les environs, quelqu’un dont je pusse invoquer le témoignage.

Dans un champ peu éloigné, un laboureur était à l’ou-