Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/538

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mes premières inquiétudes et mes premières espérances, quand revint le jour, se concentrèrent sur ma mère et ma sœur. Je comprenais la nécessité de les préparer à la joie, à la surprise de mon retour, après une absence durant laquelle, depuis plusieurs mois, elles n’avaient pu recevoir aucune nouvelle de ce que j’étais devenu. Je dépêchai de bonne heure une lettre au cottage de Hampstead, et la suivis moi-même une heure après.

Lorsque les premières effusions eurent eu leur cours, lorsque, par degrés, se rétablit entre nous le calme et le sang-froid du temps passé, je vis sur le visage de ma mère quelque chose qui m’avertit qu’une secrète oppression pesait sur son cœur. Il y avait autre chose que de la tendresse, il y avait de la douleur dans ces yeux inquiets qui ne me perdaient pas de vue ; il y avait de la pitié dans cette affectueuse étreinte de sa main qui, lentement et cordialement, emprisonnait la mienne.

Nous n’avions pas de secrets l’un pour l’autre. Elle savait comment les espérances de ma vie avaient fait naufrage ; elle savait pourquoi je l’avais quittée. Une question errait sur mes lèvres, à laquelle je voulais donner l’accent le plus calme ; j’allais lui demander si quelque lettre de miss Halcombe était arrivée pour moi ; si on avait, de sa sœur, des nouvelles qui pussent m’être communiquées. Mais quand je regardai ma mère au visage, je n’osai plus, même avec ces précautions, la questionner ainsi. À peine pus-je lui dire, déjà inquiet, avec un effort visible :

— Vous avez quelque chose à m’apprendre ?…

Ma sœur, qui était assise en face de nous, se leva tout à coup, sans un mot d’explication ; — elle se leva et quitta la chambre.

Ma mère se rapprocha de moi, sur le sofa, et de ses bras m’entoura le cou. Ils tremblaient, ces bras chéris ; d’abondantes larmes coulaient sur ce visage où était peinte une affection si fidèle.

— Walter, murmura-t-elle, mon Walter bien-aimé ! mon cœur saigne pour vous. Mon fils ! mon bon fils ! faites