Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/509

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Votre Seigneurie excusera la liberté que j’ai prise, dis-je en terminant ; mais elle connaît la parole sainte : « À leurs fruits, vous les reconnaîtrez. » Les constantes bontés, les constantes attentions du comte depuis le début de la maladie de miss Halcombe, méritent, j’en suis convaincue, toute notre confiance, toute notre estime. Il n’est pas jusqu’à la sérieuse mésintelligence survenue entre Sa Seigneurie et M. Dawson qui ne doive être entièrement attribuée à ses inquiétudes au sujet de miss Halcombe.

— Quelle mésintelligence ? demanda milady tout à coup intéressée.

Je lui fis connaître les fâcheuses circonstances par suite desquelles M. Dawson nous avait retiré ses soins ; — lui en parlant d’autant plus volontiers que je désapprouvais intérieurement, chez sir Percival, l’obstination avec laquelle il cachait à Lady Glyde (ainsi qu’il l’avait fait devant moi) tout ce qui s’était passé à cette occasion.

Sa Seigneurie se leva plus agitée, plus alarmée que jamais, du moins selon toute apparence, à la suite de mes révélations.

— C’est plus mal, bien plus mal que je ne pensais, disait-elle se promenant par la chambre, avec tous les dehors du trouble le plus vif. Le comte savait fort bien que M. Dawson ne consentirait jamais au départ de Marian ; — il a donc insulté le docteur, de propos délibéré, pour le renvoyer du château.

— Ô milady, milady ! m’écriai-je avec l’accent de la remontrance.

— Mistress Michelson, continua-t-elle d’un ton véhément, il n’est pas de paroles au monde capables de me persuader que ma sœur est, de son plein gré, de son libre consentement, au pouvoir de cet homme, et dans la maison de cet homme. L’horreur qu’il m’inspire est telle qu’aucun ordre de sir Percival, aucune lettre de mon oncle ne m’amèneraient, si je n’avais à consulter que mes propres sentiments, à manger, boire ou dormir sous son toit. Mais les affreuses inquiétudes que j’ai sur le compte de Marian me donnent le courage de la suivre