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pas, « lui ». Il avait le mérite négatif de ne faire absolument aucun bruit. Je ne sus pas distinguer le moment où il ouvrit la porte, ni celui où il la referma. Après un intervalle de silence, je me hasardai à ouvrir les yeux ; — il était parti.

Je sonnai Louis, et me retirai dans ma chambre de bain. Un lavage à l’eau tiède fortifiée de vinaigre aromatique, et une copieuse fumigation, telles étaient bien évidemment les deux précautions à prendre ; l’une pour moi, l’autre pour mon cabinet. J’y eus recours tout naturellement. Elles se trouvèrent suffisantes, je le dis avec une certaine satisfaction. Ma sieste habituelle ne fut pas troublée ; je m’éveillai, la peau moite, et parfaitement rafraîchi.

Mes premières questions furent pour le comte. Étions-nous réellement débarrassés de sa grosse personne ? Oui, le train du soir l’avait emporté. Avait-il pris son lunch, et de quoi se composait ce repas ? Exclusivement de tarte aux fruits et de crème. Quel homme, grand Dieu ! quelles facultés digestives !

S’attend-on à ce que j’ajouterai quelque chose encore ? Je ne le crois pas. Je pense avoir atteint les limites qui m’étaient assignées. Les pénibles circonstances qui survinrent à une époque ultérieure ne sont pas, je leur en sais gré, à ma connaissance personnelle. Je prie et supplie que personne n’ait l’inhumanité de rejeter sur moi le moindre blâme, à raison de ces événements qui me sont demeurés étrangers. J’ai tout fait pour le mieux. Je n’ai pas à répondre d’une calamité déplorable, qu’il était absolument impossible de prévoir. J’en suis tout à fait ébranlé. Plus que personne autre, c’est moi qui en ai souffert. Louis, mon valet (qui, à sa façon stupide, m’est véritablement attaché), se tient pour certain que je ne m’en relèverai pas. Il me voit m’essuyer les yeux, en lui dictant ces lignes. Je me borne donc à mentionner, — cette justice m’étant due, — que tout cela n’est pas de ma faute, et que je suis absolument à bout de force et de courage. Qu’ai-je besoin de rien ajouter ?