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— Ah ! l’affaire est-elle aussi sérieuse que cela ?…

Un petit courant de lumière, voyageant sous la verandah, vint se projeter sur le sable de l’allée. Le comte avait pris la lampe posée à l’intérieur de la pièce où ils étaient, afin d’examiner, en pleine lumière, le visage de son ami.

— Oui ! dit-il, « votre » physionomie, à son tour, dit la vérité. L’affaire est vraiment sérieuse. Aussi sérieuse que les questions d’argent elles-mêmes ?

— Plus sérieuse… Aussi vrai que vous me voyez sur ce fauteuil, beaucoup plus sérieuse…

La lumière disparut et l’entretien continua.

— Je vous ai montré, reprit sir Percival, la lettre, à l’adresse de ma femme, qu’Anne Catherick avait cachée dans le sable. Cette lettre, Fosco, n’est pas remplie de vaines menaces ; — Anne Catherick connaît le secret dont je vous ai laissé soupçonner l’existence.

— En ma présence, Percival, parlez du secret le moins possible. Le connaît-elle par vous ?

— Non ; elle le tient de sa mère.

— Eh ! quoi ? deux femmes en possession de votre pensée secrète !… mauvais, mauvais, mauvais, mon cher !… Ici, avant de passer outre, une question. Le motif que vous avez pu avoir d’enfermer la fille à l’hôpital est maintenant assez clair pour moi… mais ce qui ne l’est pas autant, c’est la manière dont elle a pu s’évader. Soupçonnez-vous les gens chargés d’elle d’avoir volontairement fermé les yeux là-dessus, à la prière de quelque ennemi qui aurait eu le moyen de leur rendre cette connivence profitable ?

— Non ; c’était, de toutes leurs malades, celle qui se conduisait le mieux… et, comme des imbéciles, ils se sont fiés à elle. Elle est juste assez folle pour qu’on l’enferme, et juste assez sensée pour me perdre, une fois en liberté… Comprenez-vous bien cela ?

— Je le comprends à merveille. Et maintenant, Percival, arrivons droit au but, pour que je sache à qui j’ai affaire. Où est, présentement, le grand péril de votre situation ?