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désormais tout ce qu’il voulait savoir, il ne travaillait plus qu’à dissiper les soupçons que sa conduite, il le sentait bien, n’avait pu manquer de faire naître dans mon esprit. Je fus assez sage, en de telles circonstances, pour ne pas essayer de le tromper par des explications plus ou moins plausibles, — et assez femme, — nonobstant la peur qu’il me faisait, — pour sentir comme souillée la main que j’appuyais à son bras.

Sur la grande allée sablée qui passait devant la maison nous rencontrâmes le « dog-cart », en route déjà du côté des remises. Sir Percival venait d’arriver. Il nous accueillit à la porte du château. Quels que fussent les autres résultats de son voyage, il ne me parut pas en avoir rapporté une humeur moins farouche.

— Oh ! oh !… en voici toujours deux, dit-il d’un air renfrogné. Que veut dire cet abandon où reste le château ? Qu’est donc devenue lady Glyde ?…

Je lui racontai la perte de la broche, ajoutant que Laura était allée la chercher dans les plantations.

— Broche ou non, — grommela-t-il, toujours maussade, — je la prierai de ne pas oublier le rendez-vous que je lui ai donné dans la bibliothèque pour cette après-midi. Je compte l’y trouver d’ici à une demi-heure…

Je retirai ma main passée au bras du comte, et montai lentement les degrés du perron. Il m’honora d’une de ses plus magnifiques révérences, et s’adressant ensuite gaiement au maître de la maison, qui continuait à faire la moue :

— Eh bien, Percival ? dit-il, la tournée a-t-elle été bonne ? Et votre jolie « Brown-Molly », cette bête si luisante, nous revient-elle très-fatiguée ?

— Au diable Brown-Molly, et au diable la tournée !… C’est mon lunch dont j’ai besoin.

— Et moi, Percival, répondit le comte, j’ai besoin d’avoir avec vous, tout d’abord, cinq minutes d’entretien. Cinq minutes d’entretien, mon bon ami, sur le gazon que voilà.

— Et à propos ?…

— À propos d’affaires qui vous concernent particulièrement.