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avant que Laura voulût se risquer dans les plantations, et avant que je prisse sur moi de la reconduire au château.

— Était-ce un homme ou une femme ? me demanda-t-elle tout bas, lorsque nous sortîmes enfin, et tandis que nous marchions dans l’humide obscurité de l’air extérieur.

— Je ne sais au juste.

— Qu’en pensez-vous ?

— On eût dit une femme.

— Je craignais que ce ne fût un homme, enveloppé d’un long manteau.

— Peut-être est-ce un homme. À ces clartés douteuses, il est impossible d’établir une conjecture certaine.

— Un instant, Marian !… J’ai peur, je ne vois pas le sentier… Si cette figure nous suivait ?

— Rien de moins probable, Laura ; il n’y a réellement pas de quoi s’alarmer. Les bords du lac ne sont pas éloignés du village, et chacun est libre de s’y promener, le jour ou la nuit. Ce dont il faut s’étonner, c’est que nous n’ayons pas déjà rencontré par ici, jusqu’à présent, la moindre créature vivante…

Nous étions maintenant dans les plantations. Il y faisait sombre, — si sombre, qu’il nous était assez difficile de suivre le sentier. Je donnais le bras à Laura, et nous revenions au logis de notre pas le plus rapide.

Avant que nous eussions fait la moitié du chemin, elle s’arrêta tout à coup, et me força de m’arrêter avec elle. La tête penchée en avant, elle écoutait.

— Chut ! murmura-t-elle… J’entends quelque chose derrière nous.

— Des feuilles mortes, dis-je pour lui rendre courage, ou quelques menus rameaux détachés des arbres par le vent.

— Nous sommes en été, Marian ; et il n’y a pas le moindre souffle de brise. Écoutez !…

J’entendais le bruit, moi aussi ; — on eût dit le pas léger de quelqu’un marchant sur nos traces.